Le recours à l’économie informelle constitue pourtant une dimension centrale du travail domestique et du care, en Europe comme ailleurs, où les processus de féminisation et de racialisation du travail apparaissent de manière particulièrement marquée.

L’étude combine données quantitatives, entretiens qualitatifs et ethnographie afin d’analyser les logiques sociales et institutionnelles qui configurent ce segment invisible du care. Elle restitue les expériences et les rationalités des différents acteurs impliqués : les bénéficiaires et leurs familles, les prestataires de services formels et, surtout, les travailleuses migrantes employées sans contrat régulier.

Les résultats indiquent que le travail non déclaré ne relève pas d’une pratique marginale, mais constitue une composante structurelle du care à domicile. Loin de pouvoir être réduit à une simple infraction juridique ou réglementaire, il apparaît comme le produit structurel de rapports sociaux de genre, de classe et de migration : d’un côté, la demande croissante de soins face à des dispositifs publics pas toujours suffisants ; de l’autre, l’offre contrainte de travailleuses migrantes, précarisées et invisibilisées.

L’analyse met également en évidence l’hybridation entre formel et informel, la pluralité des registres de légitimation mobilisés par les familles, ainsi que les stratégies d’autonomie et de résistance élaborées par les travailleuses.

À travers ces résultats, C. Giordano propose de réfléchir aux implications sociales et politiques de l’invisibilisation du travail non déclaré dans le care et à en saisir la portée en termes de rapports de pouvoir contemporains liés au vieillissement, au genre et aux migrations.