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Pour un changement de paradigme dans la politique d’attractivité résidentielle en Région de Bruxelles-Capitale

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La question de la « fuite » des classes moyennes vers les périphéries est au cœur des préoccupations politiques depuis la naissance de la Région de Bruxelles-Capitale en 1989. La très forte constance de cette préoccupation de la part des autorités bruxelloises trouve son origine dans le mécanisme de financement de la Région, initialement fondé à 70 % sur l’impôt sur les personnes physiques. Diverses mesures ont donc été mises en place au long des trois dernières décennies pour tenter de contrer le départ des ménages concernés. Le 172e article de Brussels Studies constate toutefois et explique l’échec des politiques de maintien des classes moyennes à Bruxelles. Il est signé par des chercheuses et chercheur de l’Université libre de Bruxelles et de l’Université Saint-Louis – Bruxelles (Hannah Berns et Gilles Van Hamme, géographes à l’ULB ; les sociologues Emmanuelle Lenel, USL-B et Christine Schaut, ULB/USL-B).

La première partie de l’article explore de façon rigoureuse les migrations entre Bruxelles et ses périphéries ainsi que les motivations d’une partie de ces mouvements, à travers une analyse compréhensive mêlant données quantitatives et qualitatives. À la lumière de celles-ci, les auteur·e·s développent l’hypothèse que l’échec des politiques d’attractivité et de fixation résidentielles est entre autres dû à une double erreur, de cible et de moyens. En ciblant préférentiellement les ménages avec enfants appartenant aux « classes moyennes » (sans en préciser les contours), la Région bruxelloise cherche à retenir un groupe en réalité peu susceptible de rester. Elle privilégie en outre l’accès à la propriété comme moyen de les ancrer durablement au sein de la Région. Or cet instrument nie la réalité de la ville comme espace de transition résidentielle.

Dans la seconde partie du texte, deux pistes sont présentées pour réorienter la politique régionale d’attractivité résidentielle : considérer la ville comme un espace non pas de stabilisation, mais bien de transition dans le cycle de vie, et mettre la focale sur des profils de ménages dont les besoins et les attentes résidentielles correspondent davantage aux milieux urbains denses.

Avec les réformes de l’État successives, la part des revenus régionaux dépendant de l’impôt des personnes physiques s’est fortement réduite, descendant à moins de 30 % (si l’on excepte la période très atypique de la crise sanitaire). Un changement vers le haut dans la composition sociale de la population ne modifierait donc pas drastiquement les recettes régionales compte tenu du poids déclinant de l’impôt sur les personnes physiques, des différences limitées entre les catégories de revenus eu égard à cet impôt et enfin, de la réforme (future) du mécanisme de solidarité nationale qui se traduira par un gain fiscal lorsque la population augmentera. La motivation fiscale à l’origine de la politique suivie ces trente dernières années a donc en grande partie perdu sa raison d’être. Les auteur·e·s suggèrent dès lors de réorienter les politiques régionales d’attractivité, suivant trois principes qui découlent de leur enquête : mieux prendre en compte les besoins résidentiels temporaires ; ne plus mettre la focale principale sur les couples avec enfants (en particulier ceux dont le profil socioéconomique indique qu’ils sont tentés par la périphérie verte) ; s’intéresser davantage au secteur locatif qui permet de mieux répondre à la grande diversité de besoins résidentiels d’une ville comme Bruxelles.

Pour lire l’article complet: Hannah Berns, Emmanuelle Lenel, Christine Schaut et Gilles Van Hamme, « Pour un changement de paradigme dans la politique d’attractivité résidentielle en Région de Bruxelles-Capitale »Brussels Studies [En ligne], Collection générale, n° 172, mis en ligne le 09 octobre 2022, consulté le 13 octobre 2022. URL : http://journals.openedition.org/brussels/6192