La généralisation du télétravail en Région de Bruxelles-Capitale
La fin des congés scolaires marque pour beaucoup de personnes la reprise de journées scandées par les déplacements vers l’école et le lieu de travail, autour duquel s’organisent également des activités de la vie quotidienne. Toutefois, une partie de ces déplacements n’a plus lieu de manière aussi régulière en raison de l’augmentation de la pratique du télétravail – soit l’exercice régulier de tâches professionnelles en dehors des locaux de l’entreprise, grâce aux outils numériques, dans le cadre d’un contrat de travail salarié.
Combien de travailleurs et travailleuses sont concerné·es par ce phénomène et avec quelle fréquence ? Que sait-on des conséquences du télétravail sur l’économie bruxelloise ? Les tendances observées à la sortie des confinements se sont-elles installées et que prévoit-on pour l’avenir ? Sur la base d’un important travail de compilation de la littérature et de données récentes, le 194e article de Brussels Studies analyse les effets potentiels du télétravail à Bruxelles en matière de bien-être, d’économie et d’emploi, d’immobilier, de mobilité ainsi que de finances publiques. Il est le fruit de la collaboration de chercheurs en géographie (Mathieu Strale et Jean-Michel Decroly), en économie (Claire Duchêne et Magali Verdonck) et en psychologie (Marine Willeput, Nathan Pudles, Sabine Pohl et Catherine Hellemans) de l’Université libre de Bruxelles.
La diffusion du télétravail a pris place dans le contexte d’évolutions sociétales plus larges, dont la flexibilisation de l’organisation de l’emploi, la diversification des parcours résidentiels, de fortes inégalités sociospatiales dans et autour de Bruxelles ou les effets de la fédéralisation et des réformes de l’État sur le financement de la Région bruxelloise. Sa diffusion engendre dès lors de nouvelles tensions et recompositions pour concilier vie privée et professionnelle, pour réaménager les espaces de bureaux à l’échelle de la ville et gérer les effets induits sur le secteur immobilier et les activités et emplois liés, pour répondre aux aspirations des travailleuses et travailleurs en matière de logement et de conditions d’emploi ou adapter l’offre de transport aux nouveaux rythmes de déplacement. En mesurer les effets n’est donc pas chose facile.
Les auteurs et autrices rappellent néanmoins que le télétravail, même dans une ville internationale dont l’économie est fortement tertiarisée, ne concerne directement que la moitié des salarié·es, l’autre moitié n’en vivant que les effets indirects éventuels. La difficulté à envisager les implications du télétravail et à y répondre tient donc aussi au fait que cette nouvelle organisation du travail crée de nouveaux clivages en même temps qu’elle en renforce d’autres : entre ville et périphérie, entre femmes et hommes, entre personnes à faible et haut diplômes, entre petites et grandes entreprises, etc.
Dans ce cadre, le rôle de la puissance publique est fondamental, que ce soit en matière de régulation des conditions de travail, d’immobilier et d’aménagement du territoire, d’activité économique, de mobilité ou de finances publiques. D’autant qu’actuellement, les experts s’accordent sur deux hypothèses – soit une stabilisation, soit une poursuite de la croissance du télétravail à Bruxelles – mais ils n’envisagent pas un retour massif au travail en présentiel.
Lire le texte complet: Claire Duchêne, Mathieu Strale, Marine Willeput, Nathan Pudles, Jean-Michel Decroly, Catherine Hellemans, Sabine Pohl et Magali Verdonck, « La généralisation du télétravail en Région de Bruxelles-Capitale », Brussels Studies [En ligne], Collection générale, n° 194, URL : http://journals.openedition.org/brussels/7772